Cours de Philosophie Terminale A : l'Existence et la Mort

Échec de la pensée pure face à l'Existence

Fondamental

L'existence est un sentiment, une pure position. Elle ne se prouve pas, elle s'éprouve à travers des expériences. L'existence n'est donc pas réductible au concept. Alors le pouvoir de la pensée trouve sa limite face à la question de l'existence. En effet, la pensée échoue à fonder la nécessité de l'existence. L'existence défie toute pensée logique et rationnelle.

Selon Kant (1724-1804), l'existence n'est pas un prédicat et n'est pas contenu dans le concept. Dans le même ordre d'idée, Kierkegaard (1813-1855) soutient contre Hegel, que l'existence est ouverture concrète, étrangère à l'abstraction et au système.

Pour Hegel (1770-1831), il y a identité du rationnel et du réel. Comme, il l'écrit si bien : « Ce qui est rationnel est réel, et ce qui est réel est rationnel ». Peut-on appliquer cette logique à l'existence ? La foi au rationnel amène Hegel à tout systématiser en liant le particulier à l'universel. Cependant, Kierkegaard pense que l'existence n'est pas de l'ordre de l'universel, mais de l'ordre du singulier. L'existence est une expérience individuelle, unique, propre à chaque homme. Comme l'écrit Kierkegaard: « Le langage de l'abstraction ne mentionne à vrai dire jamais ce qui constitue la difficulté de l'existence et de l'existant, et elle en donne encore moins d'explication. » Pour lui, le péché majeur de l'abstraction, plus précisément le système hégélien est l'oubli de la subjectivité réelle. Face au système et à l'objectivité abstraite, qui emprisonne l'existence, Kierkegaard ne cesse de mentionner que la subjectivité est la vérité. Il conclut en ces termes : « Il ne peut y avoir un système de l'existence. (...) abstraitement, système et existence ne peuvent se penser ensemble parce que, pour penser l'existence, la pensée systématique doit la penser comme supprimée, c'est-à-dire autrement que comme donné de fait. L'existence sépare les choses et les tient distinctes ; le système les coordonne en un tout fermé. » En clair, l'existence ne peut être mis en système, c'est-à-dire enfermée dans un tout philosophiquement organisé.

Pour l'existentialisme, on n'accède pas à l'existence par la pensée abstraite, mais par des expériences concrètes comme l'angoisse, la nausée et l'absurde.

Selon Kierkegaard, l'angoisse est l'expérience authentique de l'existence. Elle nous forme en dénudant nos illusions. Comme le note le philosophe danois : « L'angoisse est la possibilité de la liberté ; seulement, grâce à la foi, cette angoisse possède une valeur éducative absolue ; car elle corrode toutes les choses du monde fini et met fin à toutes leurs illusions. » L'angoisse nous éduque à la liberté.

Chez Sartre (1905-1980), c'est le sentiment de la nausée qui nous plonge au cœur de l'existence. Pour lui, toute existence est injustifiable, elle n'a aucun fondement logique et ne s'explique pas. Ainsi Roquentin, dans La Nausée, ce roman philosophique, découvre-t-il le caractère injustifiable de l'existence. Cette contingence se découvre en une expérience où l'homme se sent de trop. Comme le souligne Sartre : « tout est gratuit, ce jardin, cette ville et moi-même. Quand il arrive qu'on s'en rende compte, ça vous tourne le cœur et tout se met à flotter, comme l'autre soir, au « Rendez-vous des Cheminots » : voilà la nausée ».

Quant à Camus (1913-1960), il nous fait emprunter les voies de l'absurde pour accéder à l'existence. Sa philosophie de l'absurde est une philosophie qui prône l'absence de sens de l'existence. En effet, le caractère machinal de l'existence, le temps destructeur, l'étrangeté du monde physique me font expérimenter l'absurde. L'absurde naît d'un divorce et d'une confrontation, c'est-à-dire de la comparaison entre un état de fait, le non-sens des choses et notre vœu de clarté. Comme l'écrit Camus : « L'hostilité primitive, à travers les millénaires, remonte vers nous. (...) Une seule chose : cette épaisseur et cette étrangeté du monde, c'est l'absurde. » L'absurde est un sentiment, c'est l'expérience du sujet qui débouche sur une question fondamentale : « la vie vaut-elle ou ne vaut-elle d'être vécue ? »

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